Là, j'avais la flemme. Le genre de flemme qui vous entraîne dans ses tréfonds et ne vous lâche plus. C'était le week-end, et normalement j'en profitais pour travailler. Seulement l'été me coupait toute envie de réviser. Là ce que je voulais, c'était me détendre pour aborder les vacances en beauté. J'hésitai à aller chez l'esthéticienne mais ce n'était pas un programme très excitant, pour le coup. J'enfilai une petite robe blanche et quittai ma chambre pour vagabonder dans les rues. Le soleil était à son zénith. Je mis ma main en visière et regardai le ciel d'un bleu limpide en souriant. Il y avait beaucoup de monde, on sentait la bonne humeur à chaque coin de rue. J'adorais cette période de l'année. Je n'y étais jamais malheureuse, j'avais juste envie de m'amuser et de profiter de la vie. Je m'arrêtai devant le panneau indiquant les différentes directions. C'est alors qu'un endroit attira plus mon attention que les autres : les sources chaudes. Depuis mon arrivée au lycée Tsubasa, je n'y étais allée qu'une fois. Je sautillai joyeusement dans cette direction, fredonnant ma musique préférée : Heart Shaped Box de Nirvana.

L'onsen était impressionnant. C'était une maison de style typiquement japonais, si grande que j'avais l'impression d'être une fourmi. Les murs qui l'encadraient laissaient deviner la richesse des propriétaires du lieu. Je poussai la porte en bois et une petite vieille avec un kimono se hâta, ou du moins essaya, vers moi. Je me courbai un peu devant elle et demandai une chambre pour la journée et la nuit, repas compris. Nous avançâmes dans le dédale de couloirs, silencieuses. Je fus contente d'être à ses côtés, seule je me serais perdue. Elle ouvrit alors la porte d'une grande pièce lumineuse et qui donnait directement sur le grand bassin principal. Je la remerciai et courus me déshabiller, gardant seulement une serviette autour de mon corps nu. J'attachai mes cheveux blonds en un chignon volontairement mal fait et m'approchai de l'eau. Je mis mon pieds dedans et frissonnai. Je n'avais pas souvenir que c'était aussi chaud. En prenant mon courage à deux main, je rentrai entièrement et avançai un peu dedans.

Je soupirai d'aise, yeux clos. La sensation était délicieuse, j'avais bien fait de venir ici. Je m'assis contre un rocher, et soupirai encore. En plus de la douceur de l'eau, il n'y avait personne. Le silence absolu, serein et reposant. Je n'aurais pas pu rêver mieux. Seuls ma respiration et les clapotis de l'eau venaient troubler la quiétude de l'endroit. Je me remis à fredonner, satisfaite de ma condition. J'avais beaucoup de chance d'avoir une famille riche qui pouvait se permettre de me payer ce genre de petites folies impromptues. Comment faisaient les autres élèves, ceux dont les familles étaient pauvres ? Je n'avais vraiment pas à me plaindre, finalement. Puis peu à peu, ce calme commença à me déranger. J'aurais aimé que quelqu'un vienne, n'importe qui : homme, femme, enfant, adulte, n'importe. Ma plus grande peur était la solitude, lorsque cela durait trop longtemps. Comme si Dieu existait et m'avait entendu, une jeune fille d'à peu près mon âge s'approcha de l'eau. Elle était magnifique, avec ses cheveux roses et ses yeux bleus. Je lui souris et détournai le visage, ne sachant pas vraiment si je devais lui adresser la parole ou la laisser tranquille.