Salle de classe de Littérature de Shimizu Honda (X possible)

C'était un samedi matin comme les autres, sans rien de bien particulier, sinon qu'au lieu de me reposer sagement chez moi, je venais exceptionnellement au lycée pour donner un cours de rattrapage à la demande d'une élève. Si ma mémoire est bonne, c'était la jeune Kana Hatsu, une brillante et belle élève, doublée d'une élégance sans égal dans cet établissement scolaire. L'uniforme n'était pas légion ici et ce, à mon grand regret. Pourquoi ? Chaque jour je croise des "films d'horreur" tant certaines filles ne savent pas s'habiller et me font mal aux yeux, sans ajouter le fait que certaines portent des piercings et autres immondices sur elles... cela me donnait envie de lever les yeux au ciel et de me mettre à parler en latin pour demander à ce qu'on sauve mon âme afin de quitter cette terre de misère... j'avais été tellement perdu dans mes pensées que j'étais déjà tranquillement installé à mon bureau avec mes classeurs ouverts chacun devant moi, il ne manquait plus qu'elle arrive... d'ailleurs, elle venait d'arriver à la porte, belle et resplendissante.

Oh, bonjour Kana-chan, tu arrives bien en avance ! Installes-toi et prends ton temps.

Le temps qu'elle s'installe, je lui déposais deux classeurs en face d'elle, l'un était dédié à Eminescu, l'autre à Tagore.

Dis-moi lequel tu veux lire en premier, ensuite, on en discutera ensemble, ça t'ira ? Comme il n'y a que nous deux, autant en profiter pour avoir un cours bien plus intéressant et dynamique que d'habitude, tu ne trouves pas ?

Le réveil est dur. Très dur. Pourquoi a t-elle demandé un cours de rattrapage au Prof de Littérature ? Du moins, pourquoi au Samedi matin ? Elle se redressa péniblement dans son lit, baillant à s'en décrocher la mâchoire. Ok, l'élégance et les grâce ne sont pas encore réveillées elles. Donc Kana va aller se doucher, s'habiller, déjeuner, et ... Bah elle va partir. Pour se rendre compte en arrivant au lycée qu'elle a une demie heure d'avance. Elle soupire.

~ Boooooooooon ben ça fait rien, avec un peu de chance il est déjà là, on va pouvoir commencer de suite, et ça sera fini plus tôt. ~

Effectivement, il était déjà là. Quand elle se présenta à la porte de la salle de classe, il était déjà assis à son bureau, bien que visiblement dans un autre univers. Elle n'eut pas besoin de frapper, il l'avait déjà vue. Un sourire étira ses lèvres tandis qu'elle entrait. Une boule fit son apparition dans son estomac. C'était la première fois qu'elle profitait d'un cours particulier, et à vrai dire, elle ne se sentait pas des masses à son aise.

-" Bonjour, Honda-Senseï ! "

Elle écarquilla les yeux quand les deux classeurs furent posés devant elle sur sa table. Hum, choisir l'un ou l'autre ne serait pas tâche aisée, étant donné qu'elle ne maîtrisait ni l'un ni l'autre. Elle se pencha au-dessus du classeur dédié au poète roumain. Elle le désigna.

-" Allons pour celui-là alors. Et oui, vous avez tout à fait raison. "

Elle lui sourit doucement, se demandant dans quoi elle allait s'engager. Elle posa ses mains sur la table, les doigts entrelacés. Elle avait sorti en même temps un bloc de feuille, ainsi que deux trois stylos de couleur différente, et une règle. Cours particulier peut-être, mais pas question de bâcler la prise de notes !

-" J'espère que ça ne vous dérange pas de venir ici un Samedi matin, à ma demande ... "

Non, cela ne me dérange nullement. Très bien, nous allons donc commencer par le plus ennuyeux mais aller à l'essentiel : Mihai Eminescu est né en 1850 et mort en 1889. On peut dire qu'il est mort plutôt jeune... C'est un poète romantique mais surtout le plus célèbre de Roumanie. Aujourd'hui encore, il possède une grande place dans la culture roumaine et il est dommage qu'à son époque le Prix Nobel de Littérature n'existait pas encore, sinon, il peut être sûr qu'il l'aurait obtenu sans difficultés. Des questions ?

Je tournais quelque pages puis déposa de nouveau le classeur face à la jeune Lycéenne. Elle semblait enthousiaste malgré le fait que nous soyons un samedi matin. Peut être parce qu'elle préférait ce genre de cours, plutôt que les cours en commun où il y a toujours trop d'élèves et où l'ambiance est vraiment pesante...

Vous allez me lire ce poème et me dire ce que vous en pensez tout de suite. Je ne vous demande pas de me faire une stupide analyse académique, je vous demande votre ressenti en tant qu'être humain à la lecture de ce poète roumain. Prenez votre temps pour lire, personne ne vous demande de vous exprimer tout de suite !

Fleur bleue

" Te voilà encore tout flamme,
Haut perché dans ton ciel gris !
Pour un peu, et tu m'oublies,
Source douce de mon âme !

Des ruisseaux dans le soleil
Et toute la plaine assyre
En ta tête en vain se mirent;
Imaginaires merveilles !

Le bonheur est là, plus près...
Au sommet des pyramides
Vainement, o, mon candide
Nien Aimé, le chercherais..."

Ainsi jadis parlait-elle,
La si douce, si petite;
Mots charmants qui ressuscitent
Notre histoire bleue et belle.

"Viens mon bien-aimé, là-bas,
Là où cette immense roche
Au-dessus du gouffre accroche,
Prête à choir, et ne choit pas.

Près ce frais sous-bois tout deux
Resterons assis sur des
Vertes feuilles de mûrier
Sous la claire voûte bleue.

Tu m'expliqueras des mythes,
Contes bleues et aventures !
Moi, tout près dans la verdure,
Compterai la marguerite.

Le soleil, docteur ès feux,
Saura m'embraser tout comme
Il a su rougir les pommes
Et dorer mes longs cheveux.

Avec eux je boucherai
Ta bouche pour la punir
De trop bien savoir venir
sur la mienne se poser.

Un baiser si tu prendras
Lorsque passe entre les branches
Un filet de lune blanche
Qui nous voit ? Et qui saura ?

Nous aurons de longs baisers,
Aussi longs que notre route
De feuillage arqué en voûte,
Aussi doux que fleurs cachées.

Arrivés au seuil des portes
Nous nous dirons dans le noir
Les exquis secrets du soir;
Quand au monde, bah ! qu'importe."

Puis elle s'enfuit muette,
Me laissant seul dans la brume,
Seul, debout contre la lune,
Avec ma fleur bleue en miettes.

Tu partis, douce merveille !
Et partirent nos amours !
Fleur bleue, ma fleur d'amour,
Tout s'éteint sous le soleil...

La demoiselle avait attrapé ses stylos, et commencé à présenter l'auteur, prenant des notes, soulignant certaines choses en rouges, encadrant d'autres en bleu. Puis elle se pencha sur le texte, qu'elle lu tranquillement, une fois, deux fois, trois fois, jusqu'à ce que sa lecture se fasse le plus fluidement possible, jusqu'à ce qu'elle se fut totalement imprégnée de l'ambiance qui se dégageait de ce poème. Elle jouait avec une mèche de cheveux, la tortillant autour de son index. Ca n'était nullement un geste aguicheur, juste un tic d'une personne qui est absolument concentrée, du style qu'on pourrait discuter à voix haute à côté d'elle que ça ne la distrairait même pas.

-" Hmm ... "

Elle releva la tête, pensive. Elle grimaça lorsque sa nuque craqua un coup, ce qui la fit reprendre un peu ses esprits.

-" Ca me fait penser un peu à histoire d'amour d'adolescents, un peu clandestine, et éphémère. Le temps de l'été. Une amourette de vacances, comme on dirait aujourd'hui. "

Elle tourna les yeux vers le professeur. Elle attendit sagement qu'il fasse une remarque, qu'il approuve, qu'il ne soit pas d'accord, qu'il réagisse du moins. Elle n'avait pas trouvé autre chose à dire sur ce qu'elle ressentait. Après tout, quand il n'y a pas le schéma basique d'analyse d'un texte, les idées partent un peu dans tout les sens, sans qu'on arrive forcément à toutes les attraper avant qu'elles ne disparaissent.

La jeune Kana-chan était très studieuse et appliquée. Elle prenait des notes et semblait très organisée dans son approche à la lecture de se poème. Elle ne se laissait pas emporter par l'émotion de la lecture du poème. Bien au contraire, elle demeurait lucide afin de bien le commenter selon mes directives, chose que j'appréciais. Elle parût un moment hésitante puis fit savoir son ressenti à la lecture de l'écrit du roumain.

Amusant ! Je n'aurais jamais pensé à cette approche, ce qui n'empêche pas qu'elle demeure bonne et surtout lucide de ta part. Tu as raison, à la fin du poème on lit bien le déchirement du poète au moment de leur séparation. Bien, si tu n'as rien de supplémentaire à ajouter, nous allons passer maintenant à Tagore.

Je pris le classeur adéquat et tourna à la page d'un poème malicieux que j'appréciais beaucoup.

Voilà, voyons ce que donnera la lecture de ce poème.

"Poème XXXV

De peur que je n'apprenne à te connaître trop facilement,
tu joues avec moi.
Tu m'éblouis de tes éclats de rire pour cacher tes larmes.
Je connais tes artifices.
Jamais tu ne dis le mot que tu voudrais dire.
De peur que je ne t'apprécie pas, tu m'échappes de cent façons.
De peur que je te confonde avec la foule, tu te tiens seule à part.
Je connais tes artifices.
Jamais tu ne prends le chemin que tu voudrais prendre.
Tu demandes plus que les autres, c'est pourquoi tu es silencieuse.
Avec une folâtre insouciance, tu évites mes dons.
Je connais tes artifices.
Jamais tu ne prends ce que tu voudrais prendre. "

La demoiselle senti ses joues devenir roses sous le coup du compliment. C'est pas tout les jours que l'on reçoit un compliment d'un professeur, surtout quand on s'appelle Kana Hatsu, et qu'on ne participe que rarement en classe. Elle se redressa sur sa chaise, et commença la lecture du second poème. Pas du tout le même style, mais pour sa part, elle aimait bien aussi. Elle réussi à le lire beaucoup plus vite que le précédent, compte tenu de la taille qui n'avait rien à voir, ni même la structure en elle-même.

Elle releva la tête, pris quelques secondes à fixer le tableau pour coordonner ses idées, avant d'ouvrir la bouche et de s'exprimer de sa voix si claire et si douce.

-"Encore un poème romantique, sauf que cette fois ... Une personne ne semble pas assez en confiance pour se montrer telle qu'elle est. Elle se cache, peut-être a t-elle peur des sentiments, du regard de l'autre. Ou peut-être a t-elle peut de se dévoiler, de s'ouvrir à l'autre. "

Elle se tu quelques secondes. Elle aimait beaucoup ce poème. Elle ne le connaissait pas, mais avec à peine deux lectures, elle aurait presque pu le réciter par coeur, tant les vers s'étaient très vite imprimés dans sa mémoire. Une ébauche de sourire étira ses lèvres, alors qu'elle partait dans ses pensées. C'est le bruit du stylo tombant sur son bureau qui la fit légèrement sursauter et recouvrer ses esprits. Elle fourragea dans sa chevelure de neige tout en s'excusant.

-" Hem, désolée ... J'aime beaucoup ce poème, il reflète tellement le problème que rencontrent de plus en plus de gens ... Ce manque de confiance en soi, de confiance en l'autre ... Vraiment, j'adore. "

Je confirme. Je te fais lire ces poèmes car leur thème est le plus intéressant. Romantique, certes, mais à travers ces mots se trouvent bien des souffrances et d'autres choses intéressantes qu'on peut découvrir autant au sujet de celui qui écrit qu'au sujet du destinataire.

Je remarquais qu'elle semblait beaucoup aimer le poème. Elle le lisait sans se soucier de ma présence. Je suis sûr qu'elle le connaissait par coeur comme il le fallait maintenant. Son sourire était subtil et on sentait bien qu'elle était séduite par tant de romantisme. Soudain elle fit tomber son style et le ramassa aussitôt et s'excusa. Pauvre petite jeune fille, comme si j'étais aussi sévère que cela !

Tu as parfaitement raison. Hélas, la vie est simple mais ce sont les gens qui la complique, que veux-tu ?

Je vins alors derrrière elle et posa mes mains sur ses épaules, puis je lui chuchotais :

Et vous jeune fille, savez-vous vous simplifier la vie ?

(dsl manque d'inspi)

Calme. Elle est calme. Elle n'a jamais été aussi calme. A croire que lire ces deux poèmes a eu un effet apaisant sur elle. Elle posait les yeux sur le jeune homme, puis partait dans ses pensées, les mots résonnant dans sa tête. Elle était presque à fond dans le cours. Au bout d'un moment, la voix lui semblait beaucoup plus près, bien que moins forte. Il était derrière elle. Et ses mains sur ses épaules. Elle retint sa respiration, tandis que son rythme cardiaque doublait de vitesse. Au bout de 30 secondes, elle s'autorisa à respirer, et accessoirement à répondre à la question posée.

-" Je simpli.. Me simplifiquer, simplifier la vie ? Euh ... Bah ... C'est à dire que ... "

Elle reprit son calme. Elle était perturbée par tant de proximité, d'autant que, comme à n'importe quelle fille normalement constituée, le jeune professeur lui faisait un certain effet. Et à l'instant, elle avait l'impression de retourner quelques années en arrière, à ses quinze ans. Elle inspira profondément, et se remit à parler en articulant.

-" Après, tout dépend ce que vous appelez " Vous simplifier la vie", Honda-Sensei"

Elle profita de le savoir derrière elle pour humer son parfum. Elle aimait beaucoup se faire une idée de la personne en reniflant son odeur. Très primaire comme réaction, mais en même temps, c'est quelque chose d'important après tout, l'odeur d'une personne. Non ?

Alors que j'étais installé derrière elle, je remarquais qu'elle demeurait immobile et à la manière dont sa tête était positionnée, j'étais sûr et certain qu'elle humait mon parfum. En fait, c'était prévisible, mon parfum est l'un des plus forts et les plus connus mais surtout, l'un des plus appréciés par les femmes : Scorpio. Je me souviens encore de la manière dont May-Lin était devenue accro à mon parfum : elle ne se lavait pas les mains pour garder l'odeur du parfum ! Cela m'avait effrayé au début, puis en pur sentimentaliste, j'avais compris...

Voyons jeune fille... sinon... pourquoi avoir demandé un cours particulier un samedi matin ?

Mes mains descendirent le long de ses bras et s'arrêtèrent sur ses mains, tandis que je me penchais près de son oreille puis me dirigeant vers ses joues. Ensuite, mes bras l'enlacèrent délicatement et je commençais à faire de délicats petits baisers sur sa joue, comme un amoureux innocent le ferait la première fois qu'il a une fille dans ses bras...

Vous avez des vues sur votre professeur, il n'y a pas de honte à cela... le reconnaitre, c'est vous simplifier la vie... et faire preuve d'affection, taire cette douleur que vous procure la censure de vos sentiments vis à vis du professeur que je suis...

Toujours aussi affectueux, je descendais dans son cou et l'y embrassait plusieurs fois à divers endroits, toujours aussi délicatement, posant à peine mes lèvres sur son cou, comme je l'avais fait pour ses joues... un peu de douceur dans ce monde de brutes ne fait de mal à personne... enfin, je la retournai vers moi et la fit se mettre debout et la pris dans mes bras...

Connaissez-vous le baiser à la russe ?

Je lui fis aussitôt le fameux baiser à la russe qui consiste simplement à poser ses lèvres galamment sur celles de la demoiselle et de demeurer immobile quelques secondes, puis à se retirer ensuite, toujours aussi délicatement.

Comment le trouvez-vous ?

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