Akihiko restait accroupi, se répétant infiniment combien il était idiot. Le CD qu'il avait échappé au sol? A Rush of Blood to the Head de Coldplay. Pendant un instant, le nippon culpabilisa d'avoir laissé glisser entre ses doigts un si bon ouvrage. C'est à peine s'il ne faisait pas un bec et bobo au boitier de l'album, qui heureusement semblait intacte. Il restait là alors que l'air de You & Me de Lifehouse continuait de s'échapper discrètement du casque d'écoute qui entourait son cou. Malgré la douce musique qui en découlait, l'adolescent entendait très bien les pas de la nouvelle arrivée se dirigeant vers l'allée d'en face. Juste à savoir qu'elle se rapprochait, il tremblotait, avait des frissons et rosissait. Elle n'était pas directement dans la même allée, mais elle parcourait le chemin adjacent. De mémoire, il lui semblait que les albums de rap américain se trouvaient à cet endroit. Il se mit à se douter que la jeune femme n'avait pas choisi cette rangée là à cause de ses goûts musicaux...où alors il serait déçu de savoir qu'une si jolie dame puisse avoir des préférences aussi peu raffinées.

Les pas stoppèrent. Aki déglutit et osa relever la tête un instant, ne changeant pas de position. Je ne vous mentirait pas; la première chose qu'il vu de cette angle là c'est la plantureuse poitrine de la mystérieuse inconnue bien serrée dans ses habits de cuir. Il rougit et détourna aussitôt le regard, faisant mine d'avoir une soudaine envie de regarder les titres des chansons. Ses yeux se posèrent sur le titre " The Scientist "...aussitôt il songea à la phrase " Nobody said this was easy " et soupira. Non, il ne l'avait pas facile. À bien y penser...s'il tenait tant à fuir les femmes il aurait du aller dans un internat privé pour garçons. Trop tard pour y songer maintenant, n'est-ce-pas? 'Fin, de toute façon il n'était pas au Lycée là. Il avait toutefois jugé, par ce qu'il en avait vu, que la belle qui le fixait comme on regarde une proie avait environs son âge.

Prenant son courage à deux mains, le grand Sakamoto se chuchota un faible " Fighting! " de motivation avant de déplier ses jambes. Ces dernières commençaient à s'épuiser de toute façon...il n'avait pas l'habitude de rester accroupi sur de longues périodes disons. Et puis, qui a de telles habitudes d'abord? 'Fin, là n'est pas l'important. Maintenant à un niveau raisonnable, il lança un petit sourire fuyant à la fascinante personne qui l'observait. Il l'évitait du regard, se disant que maintenant qu'il l'avait vu sous un angle si perverti, la première chose qu'il ferait s'il osait la regarder sérieusement, c'est de se foutre les deux prunelles dans son décolleté. Bah oui, il a beau avoir peur des femmes, ça ne l'empêche pas de les aimer. Oui, ce japonais était un exemple indescriptible de la contradiction dans toute sa splendeur. Se grattant la nuque, il fouilla l'étagère et chercha l'endroit où le CD qu'il tenait toujours reposait quelques instants plus tôt. Maladroitement, il rangea le disque dans les " C " en prenant difficilement la parole, dans l'espoir de faire partir son effrayante interlocutrice.

" S-si vous cherchez de l'aide, j-je ne travailles pas ici. D-désolé. "

Ravalant à nouveau sa salive sans s'arrêter de rougir, il examina le plus secrètement possible les vêtements de la fille, ses cheveux, sa peau - qui était selon lui un tantinet trop à découvert - , son visage. Il gardait la tête baissée, et faisait mine de regarder les centaines de musiques disposées de son côté alors qu'en fait, il regardait le phénomène rare de beauté qui se trouvait tout juste face à lui. Après un moment à faire ce petit jeu, il toussota de mal aise et reprit l'élocution en marmonnant encore plus mal qu'à l'instant précédent.

"L-lui, il travaille ici. "

Il pointait du doigt l'employé - qui était retourné à son boulot en baillant bruyamment - pour accompagner ce qu'il disait. Il était intrigué par cet femme, mais en avait également beaucoup trop peur pour tenter le moindre petit mot de plus. Il ne voulait pas se présenter. Il ne voulait pas s'attacher. Il ne voulait pas continuer de la voir, aussi peu habillée, et se mettre à la désirer. C'était trop risqué. Non, les femmes sont des monstres mit sur la terre dans le but de se reproduire. Kenshi le lui avait violemment démontré quelques mois plus tôt. Elles ne voulaient que ça. De vraies perverse! Il ne se laisserait pas capturer par les filets alléchants du démon. Il était venu ici pour changer, autant prendre son courage à deux mains tout de suite!

Remarquant qu'elle ne partait guère après avoir regardé l'employé, Akihiko releva le regard pour examiner l'expression faciale de la jeune adolescente. Pourquoi semblait-elle surprise? Elle n'avait jamais croisé un homme timide? Pourtant, il n'était pas le seul. Lui même était aussi un peu étonné de voir une telle mimique sur le visage de la belle. Ils devaient avoir l'air tout les deux un peu débiles à se regarder avec leurs têtes ébahies. Il se demandait à quoi elle pouvait bien penser. Toussotant maladroitement, il fuit de nouveau son regard de la brunette et parcouru furtivement les albums sans vraiment les regarder, espérant tout simplement qu'elle allait finir par le laisser tranquille.

Pendant un moment, il cru son triste rêve exaucé...mais il avait tort. Offrant inconsciemment ( ou du moins c'est ce qu'il espérait ) une vue plutôt excitante à son interlocuteur, l'adolescente avait prit le temps de changer d'allée pour lui faire face avant de reprendre la parole. Le nippon regardait la damoiselle s'approcher d'elle en faisant claquer ses chaussures au sol. Il aurait voulu reculer, partir en courant...mais il était complètement figé sur place. Il avait bien remarqué qu'elle tentait de planter ses pupilles émeraudes dans les prunelles marrons du grand garçon. Dès qu'elle y arrivait, il détournait la tête. C'était quelque chose qu'il n'arrivait plus à faire. Quand il croisait le regard d'une femme, les souvenirs remontaient à son esprit. Il voyait Kenshi à califourchon sur lui, lui arrachant son chandail en le fixa droit dans les yeux, portant le regard le plus effrayant qu'il ait jamais vu.

La voix de Sheryl l'avait extirpé de ses mauvaises songes. Il cligna des paupières à plusieurs en entendant le charabia insensé que la potentielle cliente de la boutique lui lançait. Elle, pas assez belle? Non ! Elle était sublime. Elle était magnifique. Elle était tout à fait désirable. Il ne voulait pas de ça tout simplement. Il n'était pas près. Les femmes sont des Akumas. Des démones. Il ne voulait pas qu'elle s'approche de lui, mais l'entendre poser une telle question lui fendait le cœur puisqu'il pensait totalement l'inverse. La tête de chien battu qu'elle lui affichait ne l'aida pas. Rougissant, Aki-chan offrit enfin à son interlocutrice ce qu'elle voulait. Il plongea maladroitement son regard dans celui de la croqueuse d'homme. Il s’efforça de prendre le ton le plus sérieux qu'il arrivait à prendre dans ce genre de situation. La nervosité était si grande que sa voix sorti comme celle d'un pré-ado en train de muer. Il n'était vraiment pas dans son élément.

" N-non. J-je pense...je pense que vous êtes très jolie ! "

Rougissant, il détourna à nouveau la tête en se grattant nerveusement la nuque. Il ne tenait plus. Il ravala sa salive en sentant une goute de sueur perler sur le côté de son visage. Du revers de sa main, il l'essuya avant de parler à nouveau de sa voix peu assurée.

" Dé-désolé si je vous ai offensé. Je n'en avais pas l'intention. "

Il se demandait bien pourquoi elle insistait autant sur sa personne, mais à en juger par ce qu'elle venait de faire...il était déjà sous son emprise. Autant tenir autant qu'il pouvait. S'il devait la décevoir, il n'osait même pas imaginer ce qu'elle allait lui pondre comme scénario. Raclant bruyamment sa gorge, il tentait de faire de l'ordre dans ses idées. Il était déjà fier de ne pas l'avoir regardé directement dans le décolleté finalement. Au bout d'un moment, il finit par se dire qu'au stade où ils en étaient rendus, il valait mieux être poli et se présenter. Et puis, mamie a toujours dit que les femmes sont des reines...Sheryl venait de lui prouver cela fois...pfff...au moins milles ! Elle était non seulement très séduisante, mais elle semblait savoir comment manipuler ses proies. Sakamoto se doutait bien qu'il était déjà prit dans ses filets, qu'il le veuille ou pas.

" J-je suis Akihiko Sakamoto. Je suis en terminale au Lycée Tsubasa. Euhm...j'aime bien la musique. T-Tu y étudies toi aussi? "

C'était tout ce qu'il avait trouvé. Déjà, ils se répétait combien il était idiot et croisait lui aussi les bras pour se redonner un peu d'assurance...ça n'était pas très concluant, mais bon, c'est pas faute d'avoir essayé. La chanson de son lecteur s'était terminé et elle changeait tombant sur " Fool like me " de Cobra Starship. Il trouva ça terriblement ironique et grimaça un peu avant de débrancher son casque. Il savait bien qu'il était con, il avait pas besoin que même la technologie vienne le lui dire ! Non mais u___u !

Sur le coup, Akihiko ne comprit pas pourquoi la jeune fille rigola quand il s'excusa. Il n'y avait rien de drôle à une demande de pardon. La voir rigoler ainsi le fit sourire de façon très discrète. Comme toutes les femmes qu'il avait connu par le passé, elle était encore plus belle avec un sourire aux lèvres. Il rosit légèrement et détourna le regard à nouveau pour ne pas se laisser avoir. Oui, c'est ça. Elle était exactement comme toutes les autres. Cette inconnue n'était qu'une consœur de Kenshi. Un perverse cachée sous ses airs d'anges. Il ne voulait pas aller plus loin que les présentations. Oui, dès qu'elle aurait enfin divagué son prénom, il filerait en baragouinant la première excuse qui lui viendrait et irait se cacher pour oublier sa beauté, seul dans son coin. À bien y penser, ça lui faisait un pincement au cœur. Elle allait jusqu'à en pleurer de rire pour si peu. Était-ce sincère, ou juste une autre partie de son jeu d'actrice? Il n'en était pas certain...et ça le faisait frissonner d'effroi.

La douce voix de son interlocutrice l'avait ramené au vrai monde. Il l'observait jouer avec sa chevelure de ses fins doigts. Il avait beau tenter de ne pas la regarder, on aurait dit que plus il tentait de ne pas le faire, plus il en avait envie. À chaque bref regard qu'il posait sur la belle, il ne pouvait s'empêcher de la détailler. Il était probablement aussi pervers que la vision qu'il se faisait du sexe féminin en général...mais ça il ne l'admettrait pas. Cette dame l'intriguait. Pourquoi était elle si belle? Pourquoi insistait-elle alors qu'il lui avait plutôt clairement fait passer le message qu'il n'était qu'un citoyen banal? Pourquoi semblait-elle si nostalgique alors qu'elle observait sa propre main? Que lui arrivait-il? Pourquoi semblait-elle si seule et perdue? Elle qui semblait il y a quelques instant si confidente et joueuse se mettait soudainement à s’égarer et implorer le pardon en bégayant.

Resserrant ses bras ensembles, le nippon osa de nouveau, cette-fois-ci sans subtilité, son regard sur la superbe jeune fille. Il racla nerveusement et bruyamment sa gorge pour tenter de briser le grand silence qui venait de se poser entre eux...en vain. Elle restait muette et sa peau semblait étrangement blême. Il haussa les sourcils. Elle semblait sur le bord d'être malade. Avait-il dit quelque chose de mal? Il n'avait fait que se présenter, ça n'était surement pas sa faute...mais la pauvre adolescente semblait envahie par un sentiment dont il n'était pas certain de savoir la provenance. Il se doutait toutefois que ça ne lui venait certainement pas d'une histoire toute rose...et pendant un moment il pensa en profiter pour fuir. Oui, il aurait très bien pu profiter de l'état de sa partenaire de discussion pour déguerpir sans rien lui demander de plus, mais il n'était guère comme cela. Même si elle lui faisait peur, comme n'importe quelle femelle, il s'inquiétait pour elle.

" Vous allez bien? "

Relevant ses mains tremblotantes, il se força à les poser timidement sur les épaules dénudés de l'étrange inconnue. Sans lui demander son avis, il la poussa vers la sortie en marmonnant maladroitement quelques paroles qui se voulaient rassurante.

" Ne vous en faites pas. J-je suis là. Venez, u-un peu d'air vous fera du bien. "

Poussant la porte d'une main, il la tira vers l’extérieur en passant un court instant son bras autour du cou de la damoiselle. Au fond de la boutique, le vendeur les regardait d'un air intrigué, mais ne faisait rien pour aider sa potentielle cliente. Pff, quel con. Le japonais était rouge comme une tomate. Il venait presque de la serrer dans ses bras alors qu'il ne savait même pas son prénom. Un homme étrange se tenait près de la boutique, regardant Sheryl d'une façon répugnante. Il la regardait comme un objet. Fronçant les sourcils, Aki, se mit devant l'unique Shirabana, retira sa veste noire et la passa sur ses épaules. Ainsi, elle serait un peu plus couverte et l'homme comprendrait qu'elle était accompagnée. Il ne voulait pas vraiment rester avec elle ou faire croire qu'elle lui appartenait, mais il ne voulait pas qu'elle se fasse agresser non plus. Surtout qu'elle n'était pas dans le meilleur des états pour se défendre. Son geste fut suffisant pour faire partir le louche voyeur. Après s'en être assuré, le brun toussota, mal à l'aise, et posa gentiment sa main sur le dos de la frêle ado.

" P-Prenez votre temps pour vous soigner. J-je suis patient. "

Il caressa toujours aussi délicatement le dos de la jolie jeune femme en rougissant. Son cœur palpitait sous sa poitrine. Il était déjà dans ses filets...prit bien plus serré qu'il ne l'aurait cru. Il ne pourrait pas fuir...il ne voulait pas fuir. Il voulait savoir qui était la vraie Sheryl Shirabana.

Les joues d'Akihiko rougirent quand Sheryl posa sa tête contre lui. Il était touché de la savoir assez confiante en sa personne pour faire cela, mais en même temps il commençait vraiment à avoir peur. Il se jetai carrément dans les filets de la talentueuse chasseuse. Le sourire qu'elle avait affiché alors qu'il lui avait offert sa veste était purement divin. N'avait-elle donc jamais eu une personne douce pour prendre soin d'elle? Il était le premier à la traiter comme une humaine, ou quoi? D'un côté, ça le charmait alors que de l'autre ça le dégoutait. Et si tout les hommes que cette belle avait connu étaient comme ce vicieux pervers qu'il venait de faire fuir? Il n'osait point imaginer combien le passé se sa compagne de discussion pouvait être lugubre si c'était vraiment le cas. Il avait beau les prendre pour des démons, Aki ne comprenait guère comment on pouvait les utiliser de la sorte. Après tout, sa grand-mère lui avait bien montré qu'une femme était un être fragile dont il fallait prendre soin...il était déchiré à la voir presque malade à cause de ses souvenirs qu'il préférait ne pas savoir.

Enfin, elle s'était présenté. Sans même le remarquer, le brun avait remonté ses bras et les avaient passé autour des épaules de la sublime Shirabana. La princesse qu'on avait traité tel un chiffon. Ça se voyait dans son regard qu'elle n'avait pas eu la chance de connaitre un homme gentil. Le nippon voulait lui offrir cette opportunité comme elle lui en avait offert une de revoir les femmes comme des êtres humains...même si une bonne partie de lui était encore terriblement effrayée par la fabuleuse adolescente. Il la serrait dans ses bras pour lui montrer qu'il était là. Il la serait dans ses bras pour lui prouver qu'il se souciait d'elle. Il la serrait dans ses bras et sentait son coeur battre à la chamade. Il aurait aimé pouvoir lire dans les pensés. Le prenait-elle pour un autre pervers, avec simplement une approche différente? Avait-elle comprit qu'il n'avait pas ce genre d'intentions grotesques à son égard? Tout ce qu'il voulait, c'était la voir sourire. Il ferait tout ce qu'il pourrait en son pouvoir pour cela.

C'est pour cela que malgré une longue hésitation après la brusque et apeurante proposition de sa camarade, il finit par hocher la tête et accepter de l'accompagner chez elle. Il ne la voyait pas tenter quoi que ce soit...enfin, pas dans son état actuel. Si elle le faisait, il pourrait toujours trouver moyen de fuir. M'enfin, il ne désirait aucunement la laisser seule. Si ça pouvait la rassurer et la rendre heureuse qu'il passe la nuit chez elle, alors il le ferait. Il ravala sa salive pour se redonner un peu de courage pour ce qui risquait de suivre. Il n'avait aucunement prévu de passer la nuit chez autrui, il sentait les moments embarrassants se pointer à 100km/h. Desserrant enfin son étreinte, il lui lança un timide sourire, se grattant la joue par nervosité. Il réalisait qu'il venait quand même d'enlacer une fille qu'il connaissait depuis à peine dix minutes...et ce ne lui avait guère déplu. Il toussota avant de reprendre la parole.

" Hum...je vous laisse guider le chemin, Shirbana-san. "

Il la nommait par son nom de famille, incapable de se montrer moins formel pour le moment. Il remarqua que dès qu'elle avait su son prénom elle ne s'était pas gênée pour l’appeler ainsi. Il se demandait ce que ça voulait dire. La voyait-elle déjà comme un ami à cet instant là ou n'avait-elle tout simplement jamais appris les appellations formelles qui se faisait entre les connaissances? Il était vraiment curieux. Cette soirée l’intriguait tout autant qu'elle le faisait frissonner d'effroi. Oui, ce serait une nuit riche en découverte et rebondissements...